Toujours plus loin dans notre exploration du tango à Buenos Aires, nous nous sommes rendus dernièrement à la "milonga de los consagrados" a la tarde (c'est-à-dire l'après-midi/début de soirée) qui se tient de 16h30 à 23h00. Plusieurs blogs recensaient cette milonga comme typiquement traditionnelle et Portègne avec les hommes et les femmes séparés et l'invitation par le regard. Comme suggéré sur le site de la milonga nous téléphonons pour réserver deux places "separados" pour pouvoir mieux profiter du spectacle et danser avec des locaux (ce qui ne nous empêchera pas de nous inviter également entre nous).
La salle se trouve dans le quartier de Constitucion tout près de San Telmo (le quartier touristique des danseurs de tango où nous n'avons pas encore mis les pieds : honte à nous). L'entrée du bâtiment donne sur un grand hall carrelé noir et ocre dont les moulures du plafond très haut, l'imposant escalier en pierre et la décoration générale en grande pompe font penser à un hall de réception destiné à des officiels. Mais par contraste le carrelage est terne et piqué et la salle gagnerait à être rénovée. C'est comme ça à Buenos Aires ;-). A l'étage, l'entrée au guichet est de 28 pesos par personne et la consommation est obligatoire. Plus tard, une serveuse passera en effet nous demander chacun de commander au moins une bouteille d'eau à 12 pesos ce qui correspond pour l'instant à la gamme de prix observés dans les milongas que nous connaissons. Nous pénétrons dans la salle de danse en écartant un rideau rouge, assorti aux nappes. Les murs sont jaunes pâles et blancs. Le plafond est toujours aussi haut, la salle est immense et nous avons toujours cette impression de nous trouver dans la salle des mariages d'un hôtel de ville. Le garçon place d'abord C. sur la gauche de la salle où sont installées les femmes (et où se trouve également le bar) puis revient vers moi (F.) pour me proposer une place à une table déjà occupée par un petit groupe d'hommes qui ne se connaissent que de vue. Nous changeons de chaussures rapidement et, un peu impressionnés, commençons par observer notre environnement avant de nous lancer dans le "cabeceo" (ou "mirada", c'est-à-dire l'invitation par le regard le hochement de tête).
La salle est pleine et la piste de danse également. Au début de chaque tanda (série de 3 ou 4 tangos), les hommes vont chercher à leur table en traversant la piste les femmes qui ont accepté leur invitation, et les raccompagnent ensuite à leur table en les remerciant à la fin de chaque tanda, avant de s'en retourner à la place. A la fin de chaque tango, un brouhaha impossible s'élève car tous les couples discutent sur la piste jusqu'à ce que le tango suivant ait bien commencé depuis au moins 30 secondes. Ils dansent ensuite avec de petits pas. Un " carré", une "salida", trois petits pas de tour dans un sens et un "ocho cortado" dans l'autre : tels sont les pas qui reviennent dans 80% des cas.C'est ce qu'on appelle le "tango milonguero". L'espace accordé à chacun est petit mais il doit exister pire à Buenos Aires. Cela dit, il arrive assez fréquemment que les couples se touchent au niveau du côté ouvert de l'abrazo (l'enlacement) sans que les Portègnes n'en fassent un drame. Les collisions plus importantes sont rares par contre, mais existent bel et bien. En parlant de Portègnes, la salle en est remplie, certes, mais nous ferons au cours de la soirée également connaissance avec des Américains, des Français, des Anglais et des Italiens venus en touristes ou vivant plus ou moins en Argentine. Le sol est un parquet très lisse mais non verni qui glisse juste ce qu'il faut.
Mais il est temps d'entrer dans le vif du sujet, car il a bien fallu, après une tanda d'observation, se lancer sur la piste à notre tour. Nous vous le disons tout de suite, toutes ces paires d'yeux tournées dans votre direction au début de chaque tanda sont assez impressionnantes au début, mais très pratiques pour inviter des partenaires de manière claire et sans ambiguïté. Assez vite C. se fait inviter et j'invite moi aussi une cavalière. Il paraît que les meilleurs danseurs sont ceux qui réussissent à rester sur le cercle extérieur de la piste de danse (même si le centre est rempli, et pas que de mauvais danseurs) et je suis bien décidé à ne pas lâcher mon bout de terrain. C'est une guerre sympathique entre les tangueros de devant et de derrière qui n'hésitent pas à foncer dans la brèche dès que vous faites un écart de 20 cm. Mais bon finalement c'est comme sur l'autoroute: à force de vous imposer (mais gentiment) on vous laisse passer (désolé si nous heurtons les sensibilités). Après un court passage sur la deuxième file pendant mon premier tango je réussis à rester sur le cercle extérieur tout le reste de la soirée (ouf!).
Comme on nous l'avait dit, nous remarquons assez rapidement que danser avec des Portègnes (et nous parlons également des étrangers habitués à danser ici) a quelque chose de différent. Tout est plus doux, les gens ne se déséquilibrent pas avec de grands changements d'abrazo et les pas, répétés mille fois n'ont du coup pas besoin d'être guidés avec beaucoup de force. Cela est également lié au peu d'espace disponible. On peut avoir l'impression d'avoir une liberté d'expression limitée à quelques pas au début. Mais on s'habitue vite, on apprend à se familiariser avec cette bulle, on joue avec ses limites et on comprend mieux comment les pas peuvent s'agencer pour faire des variations très intéressantes malgré le peu de moyens mis à disposition. En tant que cavalier je me rends mieux compte à quel point la répétition de pas basiques (en condition d'espace très restreint) est importante pour parfaire son style, son sens du rythme et accroître ses possibilités d'improvisation. Le plus difficile est de soigner la ligne des jambes car on piétine un peu tant les pas sont petits mais tout cela devrait venir avec le temps, j'en suis convaincu. Les cours que nous prenons en parallèle, chez une sacré pointure du tango, nous aident également (mais nous en parlerons dans un autre article). Après avoir dansé toute la soirée, s'ouvre une parenthèse musicale avec de la chacarera (toujours cette danse folklorique argentine), de la salsa et du rock qui dure une bonne demi-heure et qui nous donne l'occasion de faire une pause. Un tirage au sort s'ensuit avec quelques lots (dont une paire de chaussures) et les tangos reprennent dans une salle qui se vide petit à petit. Nous restons jusqu'à la Cumparsita (nom du dernier tango, passé traditionnellement à la fin de chaque milonga) et un jeune danseur qui débute depuis un an vient très gentiment nous féliciter à la fin de notre danse et nous échangeons nos mails pour aller danser ensemble à l'occasion.
Nous sommes heureux d'avoir pu faire l'expérience de cette milonga traditionnelle qui nous a dépaysé par rapport aux précédentes. La musique y est agréable et on peut y manger de la pizza (miam). De plus, les gens sont sympathiques et très accueillants avec les petits nouveaux. Pour l'instant, il est probable que nous continuions à explorer les milongas de ce genre.
La salle se trouve dans le quartier de Constitucion tout près de San Telmo (le quartier touristique des danseurs de tango où nous n'avons pas encore mis les pieds : honte à nous). L'entrée du bâtiment donne sur un grand hall carrelé noir et ocre dont les moulures du plafond très haut, l'imposant escalier en pierre et la décoration générale en grande pompe font penser à un hall de réception destiné à des officiels. Mais par contraste le carrelage est terne et piqué et la salle gagnerait à être rénovée. C'est comme ça à Buenos Aires ;-). A l'étage, l'entrée au guichet est de 28 pesos par personne et la consommation est obligatoire. Plus tard, une serveuse passera en effet nous demander chacun de commander au moins une bouteille d'eau à 12 pesos ce qui correspond pour l'instant à la gamme de prix observés dans les milongas que nous connaissons. Nous pénétrons dans la salle de danse en écartant un rideau rouge, assorti aux nappes. Les murs sont jaunes pâles et blancs. Le plafond est toujours aussi haut, la salle est immense et nous avons toujours cette impression de nous trouver dans la salle des mariages d'un hôtel de ville. Le garçon place d'abord C. sur la gauche de la salle où sont installées les femmes (et où se trouve également le bar) puis revient vers moi (F.) pour me proposer une place à une table déjà occupée par un petit groupe d'hommes qui ne se connaissent que de vue. Nous changeons de chaussures rapidement et, un peu impressionnés, commençons par observer notre environnement avant de nous lancer dans le "cabeceo" (ou "mirada", c'est-à-dire l'invitation par le regard le hochement de tête).
La salle est pleine et la piste de danse également. Au début de chaque tanda (série de 3 ou 4 tangos), les hommes vont chercher à leur table en traversant la piste les femmes qui ont accepté leur invitation, et les raccompagnent ensuite à leur table en les remerciant à la fin de chaque tanda, avant de s'en retourner à la place. A la fin de chaque tango, un brouhaha impossible s'élève car tous les couples discutent sur la piste jusqu'à ce que le tango suivant ait bien commencé depuis au moins 30 secondes. Ils dansent ensuite avec de petits pas. Un " carré", une "salida", trois petits pas de tour dans un sens et un "ocho cortado" dans l'autre : tels sont les pas qui reviennent dans 80% des cas.C'est ce qu'on appelle le "tango milonguero". L'espace accordé à chacun est petit mais il doit exister pire à Buenos Aires. Cela dit, il arrive assez fréquemment que les couples se touchent au niveau du côté ouvert de l'abrazo (l'enlacement) sans que les Portègnes n'en fassent un drame. Les collisions plus importantes sont rares par contre, mais existent bel et bien. En parlant de Portègnes, la salle en est remplie, certes, mais nous ferons au cours de la soirée également connaissance avec des Américains, des Français, des Anglais et des Italiens venus en touristes ou vivant plus ou moins en Argentine. Le sol est un parquet très lisse mais non verni qui glisse juste ce qu'il faut.
Milonga de los consagrados à la fin de la soirée (cliquez pour agrandir) |
Mais il est temps d'entrer dans le vif du sujet, car il a bien fallu, après une tanda d'observation, se lancer sur la piste à notre tour. Nous vous le disons tout de suite, toutes ces paires d'yeux tournées dans votre direction au début de chaque tanda sont assez impressionnantes au début, mais très pratiques pour inviter des partenaires de manière claire et sans ambiguïté. Assez vite C. se fait inviter et j'invite moi aussi une cavalière. Il paraît que les meilleurs danseurs sont ceux qui réussissent à rester sur le cercle extérieur de la piste de danse (même si le centre est rempli, et pas que de mauvais danseurs) et je suis bien décidé à ne pas lâcher mon bout de terrain. C'est une guerre sympathique entre les tangueros de devant et de derrière qui n'hésitent pas à foncer dans la brèche dès que vous faites un écart de 20 cm. Mais bon finalement c'est comme sur l'autoroute: à force de vous imposer (mais gentiment) on vous laisse passer (désolé si nous heurtons les sensibilités). Après un court passage sur la deuxième file pendant mon premier tango je réussis à rester sur le cercle extérieur tout le reste de la soirée (ouf!).
Comme on nous l'avait dit, nous remarquons assez rapidement que danser avec des Portègnes (et nous parlons également des étrangers habitués à danser ici) a quelque chose de différent. Tout est plus doux, les gens ne se déséquilibrent pas avec de grands changements d'abrazo et les pas, répétés mille fois n'ont du coup pas besoin d'être guidés avec beaucoup de force. Cela est également lié au peu d'espace disponible. On peut avoir l'impression d'avoir une liberté d'expression limitée à quelques pas au début. Mais on s'habitue vite, on apprend à se familiariser avec cette bulle, on joue avec ses limites et on comprend mieux comment les pas peuvent s'agencer pour faire des variations très intéressantes malgré le peu de moyens mis à disposition. En tant que cavalier je me rends mieux compte à quel point la répétition de pas basiques (en condition d'espace très restreint) est importante pour parfaire son style, son sens du rythme et accroître ses possibilités d'improvisation. Le plus difficile est de soigner la ligne des jambes car on piétine un peu tant les pas sont petits mais tout cela devrait venir avec le temps, j'en suis convaincu. Les cours que nous prenons en parallèle, chez une sacré pointure du tango, nous aident également (mais nous en parlerons dans un autre article). Après avoir dansé toute la soirée, s'ouvre une parenthèse musicale avec de la chacarera (toujours cette danse folklorique argentine), de la salsa et du rock qui dure une bonne demi-heure et qui nous donne l'occasion de faire une pause. Un tirage au sort s'ensuit avec quelques lots (dont une paire de chaussures) et les tangos reprennent dans une salle qui se vide petit à petit. Nous restons jusqu'à la Cumparsita (nom du dernier tango, passé traditionnellement à la fin de chaque milonga) et un jeune danseur qui débute depuis un an vient très gentiment nous féliciter à la fin de notre danse et nous échangeons nos mails pour aller danser ensemble à l'occasion.
Nous sommes heureux d'avoir pu faire l'expérience de cette milonga traditionnelle qui nous a dépaysé par rapport aux précédentes. La musique y est agréable et on peut y manger de la pizza (miam). De plus, les gens sont sympathiques et très accueillants avec les petits nouveaux. Pour l'instant, il est probable que nous continuions à explorer les milongas de ce genre.
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